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« On ne naît pas citoyen européen, on le devient ».
La formule est on ne peut plus vraie, car faire partie d’une communauté ou d’un groupe, se reconnaître, partager des valeurs communes et échanger, nécessite d’être vécu pour devenir conscientisé.
En la matière, ce n’est certes pas la théorie ni les concepts éloignés qui font sens chez les citoyens, mais bien des réalisations au quotidien.
Ainsi, se déplacer aisément et librement au sein d’un espace en passant de son pays d’origine à un pays voisin comme on passe d’une région à l’autre, utiliser la même monnaie en Irlande ou en Espagne, voir un même drapeau flotter sur les frontons municipaux en Estonie, Pologne ou Italie, sont autant de signes palpables, concrets et visibles d’un commun partagé.
La crise sanitaire actuelle liée au covid-19 a mis en évidence la réalité de cette Europe capable du meilleur quand les transferts médicaux se font aussi spontanément et facilement vers l’Allemagne ou l’Autriche qu’à destination des régions métropolitaines. Le pragmatisme prévaut et l’authenticité de l’Union se révèle. Dans le même registre, les récentes mesures restrictives en matière de circulation sont, par leur caractère conjoncturel, ponctuelles et pour de multiples raisons la réouverture des frontières entre les pays de l’espace Schengen est fortement attendue.
Tous ces signes, nécessaires et essentiels, contribuent à la construction du sentiment d’appartenance.
Que penser alors de certaines dispositions régressives ?
C’est le cas des tarifs postaux qui ont évolué dernièrement et font désormais une distinction explicite entre les envois nationaux et à l’étranger, catégorie dans laquelle se retrouvent nos 26 voisins européens. Certes, en assimilant sous un même traitement toutes les destinations hors hexagonales, on pourrait considérer que l’on se rapproche de l’Australie ou du Japon, mis au même niveau que nos voisins allemands ou belges. Rien n’est moins sûr et il n’est d’ailleurs pas certain que ce fût le but. Dans les esprits, cela ne peut au contraire que contribuer à distancier, séparer des espaces, et nous éloigner de nos voisins.
Une récente étude souligne le manque d’information européenne chez les citoyens. Que fait-on pour y remédier ? Plus encore, que comprendre des discours visant à nous « dire » européens, et les faits qui nous « font » tout autres ? Quel sens donner à ces dispositions qui contredisent notre appartenance commune ?
Le « monde d’après » tant appelé de vœux n’a pas de date de naissance ; il est déjà en construction, par les actes valeureux comme par ceux qui font défaut, par les dispositions solidaires prises par les États comme par les relents de nationalisme de certains gouvernements, mais aussi par tout un tas de petits symboles et signes qui font sens et germent ainsi dans les consciences.
Comme l’exemple des affranchissements, au-delà du simple plaidoyer pour timbrer « européennement » nos envois postaux, c’est toute une chaîne d’éléments concrets qui sont attendus pour contribuer à rendre l’Europe visible, proche et présente, et en conséquence utile.
Une prise de conscience pour que du rouge, les signaux passent au vert.