L’Écosse, dans les yeux de Marianne

Marie-Laure Croguennec
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L’Écosse vient de réaffirmer son attachement à l’Europe au travers des élections qui ont plébiscité la Première Ministre écossaise Nicola Sturgeon. Tout un paradoxe pour le Royaume-Uni qui vient de quitter l’UE, même si l’on se souvient que nos voisins écossais avaient largement manifesté leur volonté de rester européens lors du référendum de 2016. Depuis, un autre bouleversement a déferlé par la pandémie qui n’épargne aucun territoire. Dans ce contexte, quelles conséquences dans la vie quotidienne pour les citoyens, écossais et ressortissants de l’UE ?

Rencontre avec Marianne Olier, 26 ans, chargée de marketing, vivant et travaillant à Édimbourg.

Depuis combien de temps vivez-vous au Royaume-Uni ? Dans quel cadre ?
Après avoir obtenu en France un Bachelor en management international, je suis arrivée à Edimbourg en septembre 2016 dans le cadre de mes études pour préparer un Master en Management du tourisme. Après mon diplôme, j’ai travaillé dans un restaurant, une boulangerie, une agence d’événementiel, avant d’obtenir mon premier emploi quelques mois après. Avant d’être chargée de marketing je travaillais chez un réceptif touristique, et j’organisais les voyages de groupes français venant en Angleterre, Pays de Galles et Ecosse.

Voyez-vous des effets du Brexit dans votre vie quotidienne ? Si oui, comment les vivez-vous ?
Oui, surtout au niveau du statut des immigrants. On a dû mettre à jour nos statuts pour pouvoir continuer de vivre au Royaume-Uni comme avant le Brexit. Maintenant il est presque impossible pour des ressortissants d’Europe de venir vivre et travailler au RU, les conditions sont pour moi trop nombreuses et difficiles à obtenir (salaire minimum, nécessité d’avoir un job avant d’arriver dans le pays, etc). On en parle beaucoup dans les médias et entre amis, mais je trouve que ce sont surtout les Internationaux qui en parlent, les Britanniques sont plus discrets à ce sujet.

Selon vous, quelles sont les causes du Brexit ?
L’histoire en elle-même du pays : depuis la Seconde Guerre mondiale, le Royaume-Uni est entré et ressorti de l’UE, certains gouvernements précédents étaient complètement contre le fait d’être un membre de l’UE. Le Royaume-Uni est une ile, qui est fière d’être indépendante et de ne pas faire comme tout le monde, à mon avis. Et puis il y a aussi la montée d’une vision droite/extrême-droite, comme dans tous les pays. Dans leur campagne pour le Brexit, c’était un sujet qui revenait beaucoup : avec le Brexit, il y aurait moins de chômage comme il y aurait moins d’immigrants. Certains politiciens disaient même que les taxes seraient moins élevées, et que le coût de la vie serait moins élevé.

En tant que française, avez-vous observé des évolutions dans la société britannique les dernières années ?
En tant que française je suis habituée à m’exprimer quand quelque chose ne va pas. Les Britanniques sont beaucoup plus « polis » : quand quelque chose ne va pas et que le gouvernement fait une erreur par exemple, ils ont tendance à se plaindre, mais pas plus. C’est assez frustrant en tant que Française car je pense que les choses pourraient changer si tout le monde exprimait ses pensées. Sinon je ne trouve pas que la société a évolué tant que cela. Après, je vis en Écosse, un pays très ouvert et accueillant, je ne sais pas si cela serait le même discours pour le sud du Royaume-Uni.

Les Écossais s’affichent pro-européens ; comment cela se manifeste-t-il ?
On voit beaucoup de drapeaux de l’Ecosse et de l’UE sur les fenêtres des gens, il y a aussi beaucoup d’associations qui sont pro-Europe. Et puis Nicola Sturgeon souhaite retourner dans l’UE, c’est une grande partie de son discours politique.

La crise sanitaire liée au covid-19 sévit partout dans le monde ; quelles sont les conséquences pour vous ?
Je travaillais dans le tourisme, j’ai été en chômage partiel pendant 5 mois et puis ils ne m’ont pas gardée (mon entreprise a dû laisser partir 70% de son staff). Par chance j’ai retrouvé un boulot assez facilement, mais pas dans l’industrie que je souhaitais (vision industrielle). Je prends ce boulot comme une expérience car j’apprends beaucoup tous les jours. Le plus dur est de ne pas pouvoir voyager et rentrer en France, ça va faire bientôt un an…

En tant que ressortissante française, quel est votre regard sur la gestion de cette crise au Royaume-Uni ?
Je ne veux pas être pessimiste, mais la gestion a été très mauvaise. Le gouvernement a complètement raté la gestion de la première et deuxième vague. En juillet et août, il encourageait tout le monde à sortir pour manger et boire, alors que le reste de l’Europe faisait beaucoup plus attention. On n’a jamais eu de vrai confinement. Selon moi le gouvernement aurait dû être beaucoup plus strict. Après, sa politique pour les vaccins est pour moi assez réussie, les gens ne sont en général pas réticents à prendre ce vaccin, ce qui est une bonne nouvelle.

Comment voyez-vous aujourd’hui l’avenir de l’Europe ?
Il est pour moi nécessaire de renforcer les relations entre tous les pays européens, que ce soit pour des raisons économiques, sociales ou politiques. J’ai confiance en l’Union Européenne, ses aspects positifs sont plus élevés que ses aspects négatifs.

Quelles sont, selon vous, les valeurs européennes essentielles ?
L’inclusion, le melting pot entre les cultures, le respect entre pays totalement différents, la sécurité (économique, politique, sociale).

Aujourd’hui, qu’est-ce que cela signifie d’être citoyenne française, et donc Européenne, vivant au RU ?
Être Européenne pour moi veut dire être ouverte à d’autres cultures, et me permet d’être plus ouverte d’esprit. Je retrouve cet état d’esprit en Écosse même si le pays appartient toujours au Royaume-Uni.

Publié par Marie-Laure Croguennec

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