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Il y a quatre mois, juste après l’élection européenne, on nous promettait de tirer les leçons de ce scrutin qui a apporté son lot de surprises. Rappelons-nous : déjouant les prévisions, les Français ont démontré par leur participation que l’Europe ça comptait. Déjouant les sondages, les électeurs ont placé les partis proeuropéens en pole position. Déjouant les annonces, les citoyens ont exprimé leur intérêt pour ce destin commun que d’aucuns présentaient prématurément enterré.
L’actualité estivale n’a pu que renforcer cette nécessité de faire grandir l’Europe : l’obscurantisme de certains dirigeants face à la dégradation climatique et la crise politique au Royaume Uni dans la dégringolade du Brexit ont été au cœur d’une actualité inquiétante pour ne pas dire alarmiste.
Sans oublier le drame des migrants en Méditerranée qui se poursuit, et dont l’ampleur et la récurrence ne doivent pas faire oublier la gravité. Pour un peu on s’y habituerait.
Si les commentaires et les bonnes intentions vont bon train à l’issue des scrutins, il n’est pas rare de constater rapidement une amnésie sur les leçons à tirer. D’aucuns focalisent dorénavant sur les élections municipales du printemps prochain faisant fi des engagements louables et loués à l’envi.
Et pourtant, l’enjeu est considérable : quel avenir pour un peuple isolé ou un État indépendantiste ? Face à la mondialisation, le salut n’est pas le regard passéiste du « c’était mieux avant », si tant est qu’il soit vrai. Au fait, vraiment mieux ?
Un coup d’œil dans le rétroviseur nous amène à comparer : Guerre ou paix ? Isolement ou union ? Repli ou partage ? Il n’y a jamais eu une période pacifique aussi longue sur le vieux continent que depuis que les belligérants d’hier ont osé, au sortir du conflit le plus dévastateur de leur histoire, se réconcilier.
Alors non, ce n’était pas mieux avant. Quelques hommes, Robert Schuman en chef de file, y ont cru et ont à leur manière soulevé les montagnes de fatalité. En bravant ces obstacles, ils ont rendu le projet européen réel.
70 ans plus tard, les citoyens européens ne s’y trompent pas ; ainsi, de manière parfois inconsciente mais évidente, ils se dirigent d’eux-mêmes peu à peu vers un sentiment d’appartenance revendiqué qui ne demande qu’à se nourrir. À l’image des turbulences du Brexit qui aura balayé les velléités de sortie et au contraire solidifié chez les 27 la volonté d’appartenance à l’UE.
Pour autant, il serait hasardeux de compter sur un effet spontané et durable, ou une démarche allant de soi. La conscience européenne, c’est autre chose ; elle émerge d’un cheminement, d’une construction. Un des piliers en est l’éducation.
Du dire au faire
Aujourd’hui, on peut s’interroger sur la place accordée à l’éducation à la citoyenneté européenne dans les programmes scolaires. Soyons lucides : elle est parcimonieuse pour ne pas dire invisible.
Certes, en cette rentrée, le ministre Blanquer a instauré la présence des deux drapeaux, le national et l’européen, dans les classes. L’un ne domine pas l’autre ; l’un n’exclut pas l’autre. Alors oui, c’est un symbole. Et même un symbole fort, n’en déplaise aux détracteurs de tous bords. Le drapeau fait partie des éléments d’appartenance permettant de se reconnaître une culture et un destin commun.
Mais ça ne suffit pas : c’est sur la base d’une solide éducation à la citoyenneté européenne que pourra se construire cette reconnaissance commune, ce sentiment qui fait dire qu’en allant en vacances en Italie ou en études en Espagne, on ne va pas « à l’étranger » mais dans un territoire ami, une région proche ou voisine, un pays de l’Union européenne. Il est à la fois important et urgent de nourrir le projet européen de son socle éducatif : les contenus des programmes doivent être densifiés, exprimés, et se revendiquer d’une fière appartenance à l’Europe et s’en décliner.
C’est cette éducation qui fera socle à tout volet du projet européen, qu’il soit économique, social, écologique, énergétique, culturel, etc. C’est cette éducation qui fera rempart aux nationalismes exacerbés. C’est cette éducation qui édifiera l’union entre les peuples d’Europe pour faire grandir et vivre l’Union européenne pour le bien de ses citoyens. En cette rentrée scolaire, soyons audacieux, courageux, téméraires, confiants pour impulser des initiatives d’éducation à la citoyenneté européenne. De la même manière qu’il n’y pas de petits citoyens ni de petits élèves moins méritants, il n’y a pas de « petites choses » en la matière.
Les occasions sont multiples autant que diversifiées à l’image de la traditionnelle Journée européenne des langues du 26 septembre, initiée par le Conseil de l’Europe depuis 2001. Sachons trouver les voies pour donner de la voix à l’Europe.
Avec le CECI, nous aurons au fil des mois à venir l’occasion de revenir sur cette question importante et déterminante.