En passant par la Lorraine…

Marie-Laure Croguennec
Les derniers articles par Marie-Laure Croguennec (tout voir)

Qu’il s’agisse d’une promenade impromptue ou d’un itinéraire programmé, qu’on y vienne en solitaire ou accompagné, que le calendrier indique août ou février, tout moment sied à la découverte du lieu d’habitation que Robert Schuman, père fondateur de l’Europe, se choisit pour y vivre et s’y ressourcer, sans savoir à l’époque qu’il y ferait naître une des plus audacieuses idées que le XXe siècle ait connues.
Abritée dans un village perché à proximité de Metz, la maison de Scy-Chazelles se devine derrière un portail d’où la silhouette de l’Européen guette le visiteur et l’invite d’un regard souriant.

Une invitation à une rencontre
La demeure dans laquelle Robert Schuman vécut 35 années dévoile la personnalité de son propriétaire.
D’une pièce à l’autre, l’on pénètre dans l’intimité de l’homme qui consacra l’étage tout entier, doté d’une vue dégagée, à ses activités professionnelles et fonctions ministérielles comme en témoigne l’espace largement occupé par bibliothèque et bureau.
La toute proximité avec sa petite chambre révèle vraisemblablement la proportion du temps passé dans l’un ou l’autre des lieux.

Le bureau, pièce essentielle s’il en est, accueille outre des centaines de livres un piano rappelant la place accordée à sa culture artistique et musicale. C’est dans cette pièce conservée en l’état que le ministre des Affaires étrangères écrivit la déclaration qu’il prononça le 9 mai 1950, rendant possible l’œuvre de paix qu’il souhaitait tant.
Grande idée que cette audace de penser, moins de cinq ans après la fin de la guerre, que les nations française et allemande, belligérantes à trois reprises en trois-quarts de siècle, puissent non seulement se réconcilier mais œuvrer ensemble.

De grandes idées germées dans l’humilité
Pour être grande, une idée doit-elle naître dans une vaste demeure ? Rien n’est moins sûr à la découverte de l’intérieur de ces murs d’où se dégagent plusieurs caractéristiques : sobre et riche, simple et coquette, petite et grande.
Sobre par la fonction d’utilité des différents éléments, la maison regroupe meubles et objets essentiels.
Simple, elle se montre fonctionnelle, dépourvue de fioritures.
Petite, elle le devient par la proportion considérable entre les éléments nécessaires et son occupation optimale jusque dans les moindres recoins.
Pour autant, la maison de Robert Schuman n’est pas en carence d’âme ; bien au contraire, la pureté et la simplicité des lieux la rendent riche par la présence des livres et ouvrages chargés d’histoire, coquette par le soin et l’attention apportée à chaque endroit, grande et chaleureuse par l’esprit qu’elle y fait rayonner.
Ces oppositions mettent en lumière une des principales qualités humaines de l’homme Schuman avant tout altruiste et personnaliste : l’humilité. Loin des ors du pouvoir, c’est dans cet espacé dénué de surperflu mais rempli de valeurs essentielles que s’est écrite une page fondamentale de l’Histoire européenne.
C’est probablement la sincérité du Père de l’Europe qui émerge des hauteurs de ces collines mosellanes. Celui qui, par le triste jeu des conquêtes de guerre, a connu des nationalités différentes s’est-il inspiré de la carence de paix qu’il a ainsi connue ou des paysages paisibles qui s’offraient à lui dans le prolongement de son jardin ? Est-ce l’écho sourd des morts engloutis dans la terre messine qui a façonné la détermination qui fut la sienne pour user de stratégie en saisissant le moment idoine ? La beauté fragile des collines l’a-t-elle encouragé à voir au-delà d’un horizon incertain ?
Parce que les sources d’inspiration ont surtout à voir avec la sincérité et la conviction, il ne suffit pas de s’installer dans des palais pour y écrire des pages d’Histoire. La création est plus une affaire de détermination que de réverbération.
Il n’est pas superflu de se pencher aujourd’hui sur cette réflexion, à une époque où l’on privilégie souvent l’apparence, rendant primordial le superficiel pour ne pas dire l’artificiel, au détriment de l’authentique moins clinquant.
Bien sûr, n’est pas Robert Schuman qui veut ; encore faut-il avoir la force des convictions.
Mais chacun et chacune, de son niveau, est à sa place pour œuvrer, créer, innover, inventer, oser et contribuer à poursuivre ensemble l’écriture du projet européen. Et à ce stade, les gouvernants et responsables politiques ont bien entendu leur rôle à jouer et des actes à poser, en particulier dans deux domaines où la carence d’Europe est optimale : l’éducation et l’information.
Et là, le niveau ne peut que monter…

Maison de Robert Schuman 
57160 Scy-Chazelles 
03 87 35 01 40
www.centre-robert-schuman.org

Publié par Marie-Laure Croguennec

1 commentaire

[…] En prolongement, n’hésitez pas à lire ou relire l’article du CECI, « En passant par la Lorraine… » […]

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.