9 mai, des symboles… et des actes

Marie-Laure Croguennec
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Le mois de mai 2023 est riche en jours fériés, tombant pour la plupart en semaine cette année.
À l’exception des personnes n’exerçant pas le lundi, toutes les autres peuvent se projeter dans des semaines hautement raccourcies où le défi consiste à accomplir autant de travail en moins de temps. Un comble en ce mois commençant par la fête… du travail.

En effet, ces jours fériés incombent tout d’abord au 1er mai, fête du travail s’il en est. 7 jours plus tard, on remet ça ; cette fois, c’est pour commémorer l’armistice de la guerre 1939–1945. On ne va pas s’en plaindre : il nous paraît évident et acquis que ces événements hautement symboliques dans le domaine des droits pour l’un et des valeurs de paix pour l’autre soient reconnus au point qu’un effort économique, civique et… de relâche leur soit accordé. Cela dit, s’ils nous semblent évidents et inscrits dans nos calendriers, cela n’a pas toujours été le cas : c’est depuis la Libération et réellement en 1948 que le 1er mai est devenu férié et chômé, mais ce n’est pas le cas du 8 mai qui lui a rejoint les jours enviés du calendrier en 1981. Eh oui ! Alors que l’armistice du 11 novembre 1918 s’est imposé à 4 ans d’âge dans les jours fériés dès 1922, il aura fallu 9 fois plus d’années, soit 36, pour que la paix sur le continent européen soit validée à hauteur de sa grande sœur de 1918. Allez comprendre… Peut-être fallait-il s’assurer que cette fois-là elle serait durable ?

Si aujourd’hui ce calendrier perforé se conjugue parfaitement avec une envie et un besoin de printemps chantant, il ne faudrait pas pour autant négliger l’origine de ces bienfaits. Assurément, quand le calendrier les rend plus visibles, il se peut qu’ils résonnent davantage. Quoi qu’il en soit il ne faudrait pas en oublier la genèse.

Jamais deux sans trois

À défaut de la semaine des quatre jeudis, le mois de mai pourrait et devrait bien accueillir la dizaine des trois jours fériés. Sans minimiser la légitimité des deux premiers, un troisième devrait indubitablement s’imposer : le 9 mai. Non pas parce que Léonid Brejnev l’a imposé en 1965 comme victoire des Alliés sur l’Allemagne nazie, décalage horaire oblige, mais parce qu’un certain mardi de 1950, le 9 mai, le courageux, le valeureux, l’audacieux Robert Schuman a prononcé un discours au salon de l’horloge du quai d’Orsay appelant les ennemis d’hier à se réconcilier. Presque passée sous silence en son temps, cette date a donné naissance le 18 avril 1951 au Traité de Paris, créant la CECA, première pierre de la construction européenne. Il aura fallu d’ailleurs attendre 1985 pour reconnaître cette date comme l’acte fondateur de l’Europe de paix, celle de la citoyenneté et des peuples.

Les échos médiatiques peuvent la rendre plus ou moins discrète ou visible, mais quelles que soient les années il revient à en célébrer cet acte fondateur, garant de notre paix aujourd’hui âgée de 78 ans : un record quand on sait que les précédentes périodes de paix sur le continent européen n’ont jamais excédé 27 ans.

La faute à qui ?

Alors, à l’heure où depuis quatorze mois les bombes résonnent sur le sol ukrainien, la Paix, durable et continue, ne mériterait-il elle pas une incarnation forte ?
La Paix voulue, souhaitée, et mise en germe par Robert Schuman ne vaut-elle pas une journée fériée dans l’année au sein des vingt-sept États membres de l’Union européenne ?

Comme tout peuple se retrouve dans les symboles comme une devise ou un drapeau, parce que c’est par des réalisations concrètes que se construit le sentiment d’appartenance, un jour commun partagé s’impose comme ciment d’une construction identitaire et citoyenne : à quand le 9 mai, férié et chômé, institué comme un moment partagé entre les 450 millions de citoyens européens ?

Et pour une fois, à juste titre, on pourra dire « c’est la faute à l’Europe ».

Publié par Marie-Laure Croguennec

1 commentaire

le lann le lann

belle idée, parfaitement justifiée, dans les jours que nous vivons …

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