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« Non, ce sont des élections européennes et en aucun cas un scrutin national. » Nous avons tous entendu pendant la campagne ces propos justes et justifiés, prononcés par l’exécutif pour contrer les tentatives de désinformation de certains candidats cherchant un marche-pied électoral pour accéder au pouvoir, prêts à tout et ne reculant devant rien quitte à galvauder la réalité et les enjeux du scrutin européen et faire fi de toute éthique : par nature, les élections européennes sont déconnectées d’une quelconque incidence parlementaire nationale, et protègent le scrutin de manœuvres électoralistes nationales.
En écho, nous sommes nombreux à avoir relayé et étayé cette évidente affirmation par une détermination à refuser la moindre instrumentalisation des élections européennes. La solennité du rendez-vous démocratique européen imposait au minimum de respecter la nature et l’objet de ces élections et ne souffrir d’aucun détournement populiste.
Et… patatras ! L’annonce du Président de la République est venue balayer d’un revers de parole cette garantie institutionnelle, allant même jusqu’à inverser les enjeux et démentir les propres propos tenus. Comprenne qui pourra.
Record battu
En ce 9 juin, en France la soirée électorale européenne aura duré moins d’une heure. En effet dès 21 h, il ne fut plus question des résultats à l’échelle du vieux continent, mais de la perspective programmée d’un scrutin législatif chevauchant allègrement l’échelle européenne pour se replier sur un périmètre national : stratégies et spéculations n’ont pas tardé à alimenter commentaires et débats qui auraient pu s’apparenter à une mauvaise blague si la situation n’avait pas été aussi dramatique.
Sincèrement, l’Europe méritait mieux.
Depuis, près de quatre mois se sont écoulés. Après la dissolution de l’Assemblée nationale, la saison estivale a vu se succéder à un rythme très aléatoire élections législatives, démission du gouvernement devenu astreint à gérer les affaires courantes, nomination d’un nouveau Premier ministre, et enfin constitution d’un nouveau gouvernement.
Et l’Europe dans tout ça ?
Dans cette perspective, les pronostics sont allés bon train pour spéculer sur les nominations aux différents ministères, cristallisant sur ceux de la Place Beauvau et de Bercy les paris les plus nombreux. Sans minimiser les enjeux en matière de sécurité, voir le Ministère en question susciter autant de convoitises en dit long sur le regard « intérieur » que portent les politiques. Gageons que ce ne soit pas le reflet d’un repli sur soi ni d’une vision rétrécie. Sans aucun doute, le portefeuille du Quai d’Orsay attribué depuis le 21 septembre au discret Jean-Noël Barrot, à en juger par ses sept mois passés – dans le contexte des élections européennes, rappelons-le – à sa mission en charge de l’Europe, a fait couler moins d’encre. Gageons alors que la formulation « Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères » hiérarchisant les termes soit évocatrice de sens et porteuse d’ambition européenne à hauteur des enjeux.
Malgré les conséquences nationales que nous traversons actuellement sur le plan des institutions, notre quotidien ne s’arrête pas à la porte de nos frontières avec nos voisins. Le monde a continué d’exister à défaut de tourner rond depuis le 9 juin, même si nous nous en sommes détournés par un regard franco-français subi ou assumé : le dictateur russe est toujours aussi redoutable, le terrorisme au Proche-Orient toujours aussi présent, les élections américaines n’ont jamais été aussi proches.
Et puis, ne l’oublions pas, l’Union européenne a procédé elle aussi à l’installation de ses nouveaux députés avec les nominations qui ont suivi. La reconduction d’Ursula von der Leyen ne doit pas occulter le rendez-vous démocratique européen qui s’est joué lors de ces élections avec tous nos voisins.
Maintenant ou jamais
Dans ce contexte, l’Europe est bien présente par la nomination du nouveau Premier ministre : par sa fonction renouvelée de Commissaire européen et son rôle de négociateur en chef pour l’UE dans le cadre du Brexit, Michel Barnier, à la fois connu et reconnu à l’échelle européenne, devrait jouer à domicile dans l’espace européen.
Les conditions ne sont-elles pas réunies pour plus d’Europe ?
Même si son exercice s’annonce périlleux sur bien des plans, l’audace et le courage doivent être au rendez-vous pour réparer la confiance en nos gouvernants et représentants. Parmi tous les enjeux rivalisant d’importance, celui de reconnecter les citoyens avec les institutions est sans doute essentiel tant pour un avenir proche que pour l’exemple et le modèle qui s’inscriront dans la mémoire collective ; il y va de l’exercice de notre citoyenneté.
Alors pour s’éloigner de ce qui a pu être ressenti comme une tromperie le 9 juin en y associant l’Europe de manière maladroite pour ne pas dire malsaine, et surtout parce que la réparation ne doit pas se confondre en un trompe-l’œil ce qui rendrait le remède pire que le mal, l’heure est venue de transcender les sempiternels fonctionnements systémiques sclérosants : osons nous décentrer de nos habitudes, osons nous détacher sans pour autant les renier de nos particularités, osons voir grand. Jean Monnet le prédisait : « L’Europe se fera dans les crises et elle sera la somme des solutions apportées à ces crises. »
Soyons au rendez-vous.